Le nouveau rôle du wali / gouverneur :Une autorité déconcentrée au service de la décentralisation

Hicham BERJAOUI

Professeur de droit public

Université Cadi Ayyad, Marrakech.  

La complémentarité entre la décentralisation et la déconcentration fait partie des outils de territorialisation équitable et d’optimisation des politiques, des programmes et des plans de développement territorial.

Dans plusieurs discours, Sa Majesté le Roi incite les autorités centrales à renforcer le transfert du pouvoir de décision tant aux structures administratives décentralisées (les collectivités territoriales « CT ») qu’aux structures administratives déconcentrées (les services déconcentrés de l’Etat) pour garantir aux citoyens des prestations répondant aux exigences de qualité et de proximité.

La mise en œuvre de la complémentarité entre les programmes de développement menés par les CT et ceux opérationnalisés par les services extérieurs de l’administration centrale, ne peut, en bonne logique, incomber qu’à l’institution territoriale dont les attributions s’étendent, à la fois, au domaine de décentralisation et à celui de déconcentration, en l’occurrence le wali ou le gouverneur.

Le rôle consistant à garantir la complémentarité et la synergie entre l’action administrative décentralisée d’une part et l’action administrative déconcentrée d’autre part, dévolu auxwalis et gouverneurs, est expressément prévu par l’article 145 de la Constitution chargeant ces derniers :

  • D’assurer la représentation du pouvoir central ;
  • D’exercer le contrôle administratif sur les CT et d’assister leurs présidents dans la conduite des missions en relevant ;
  • De coordonner les activités des services déconcentrés de l’administration centrale et de veiller sur leur bon fonctionnement.

De même, les lois organiques relatives aux CT permettentà celles-ci de se faire assister par les services déconcentrés de l’Etat, par l’entremise du wali ou du gouverneur selon le cas (Ex : l’art. 36 de la loi organique n° 111-14 relative aux régions).

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De plus, le rôle de coordination et de contrôle de l’action des services déconcentrés de l’Etat, incombant au gouverneur, est prévu par le dahir portant loi n° 1-75-168 (15 février 1977) fixant les attributions du gouverneur. Ce texte indique que le gouverneur est le représentant de Sa Majesté le Roi et le délégué du Gouvernement. A ce titre, il assure l’animation, le suivi et le contrôle de l’activité des services extérieurs de l’administration centrale et de celle des établissements publics relevant de sa compétence territoriale. Le même texte institue auprès du gouverneur un Comité technique, composé des agents d’autorité et des chefs des services extérieurs de l’administration centrale. Les attributions de ce Comité sont fixées par l’article 34 du décret n° 2-17-618 (26 décembre 2018) portant charte nationale de déconcentration administrative. Elles consistent à assurer la coordination des politiques sectorielles menées à l’échelle de la province ou de la préfecture et à faciliter la réalisation des investissements publics qui s’y destinent.

Outre ce qui précède, l’article 27 du décret n° 2-17-618 relatif à la Charte nationale de déconcentration administrative pré-cité, énonce qu’en leur qualité de représentants du pouvoir central, les walis et les gouverneurs veillent à prendre toutes les mesures appropriées et nécessaires, en vue d’assurer l’accompagnement, par les services déconcentrés de l’Etat, des collectivités territoriales, de leurs groupements et de leurs organismes, dans la réalisation de leurs programmes et projets de développement.

De surcroît, l’article 30 du décret sus-mentionné, institue auprès du wali de la région et sous sa présidence, un Comité régional de coordination (CRC), composé des gouverneurs des provinces et préfectures relevant de la région, du Secrétaire général des affaires régionales, des chefs des services déconcentrés de l’Etat, des responsables des Centres régionaux d’investissement (CRI) et des responsables régionaux des établissements publics.

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Le CRC est chargé, entre autres, de veiller sur la cohérence et la convergence entre les politiques, les programmes et les projets publics d’un côté, et les schémas régionaux d’aménagement des territoires et les programmes de développement régional, de l’autre. Le CRC donne, également, son avis sur les contrats-programmes à caractère régional liant l’Etat aux établissements publics et aux CT, notamment la région.

Aussi importe-t-il de noter que le décret portant charte nationale de déconcentration administrative précise, dans son chapitre VI, que l’assistance et l’accompagnement que les services déconcentrés étatiquesapportent aux CT, s’opèrent sous la supervision des walis ou des gouverneurs selon le cas.

Le même chapitre énonce que les services déconcentrés sont tenus de coopérer avec les CRI pour entreprendre toutes les mesures destinées à faciliter et à inciter les investissements. Dans ce sillage, il y a lieu de rappeler que la loi n° 47-18 portant réforme des CRI et création des commissions régionales unifiées (CRU) d’investissement, a érigé ces derniers au statut d’établissement public doté de la personnalité juridique, et en a placé les conseils d’administration et les commissions régionales unifiées, sous la présidence du wali de la région concernée.

Il s’ensuit que le wali de région supervise, au moyen des rapports juridiques le liant aux CRI, toutes les mesures mises en œuvre en vue de faciliter et fluidifier l’acte d’investir.

En propos conclusifs, les outils juridiques (contrôle, suivi, sanction etc) et institutionnels (le CRC, le CTPP, le CRI, la CRU etc) garantissant la complémentarité entre la décentralisation et la déconcentration, donnent une place de choix aux walis et gouverneurs qui, en opérationnalisant le double rôle de contrôleur administratif de légalité des actes des CT et de coordonnateur des activités des services déconcentrés de l’Etat, peuvent contribuer à :

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  • Mieux territorialiser les politiques et programmes de développement ;
  • Rendre le développement territorial à la fois : plus équitable, en optimisant ses capacités de ciblage, et moins coûteux.
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